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Mauvais résultats du Syli National : diagnostic d’un profond mal !

Mauvais résultats du Syli National : diagnostic d’un profond mal !
0 commentaires, 12 - 9 - 2024, by admin

Par Abdoulaye Condé
Les 2 premiers matchs du Syli National dans le cadre des éliminatoires de la CAN Maroc 2025 conclus par des défaites (0 -1) face à la RDC, (1-2) contre la Tanzanie, donnent lieu à des commentaires de tous ordres et dans tous les sens.
Face à la légitime déception du public guinéen, les experts, spécialistes et passionnés du Football vont dans tous les sens pour cibler à la fois et pêle-mêle, la Fédération Guinéenne de Football, le staff ou l’équipe elle-même ou quelques joueurs incriminés d’être à l’origine ou la cause de telle action ou tel danger ayant conduit aux buts encaissés. Même d’ordre mystique quand certains attribuent les contre performances du Syli National à des péchés commis à leur égard. Cependant, la réalité du mal est ailleurs.
Exactement, comme ces mauvais résultats en 2021, après les 3 matchs nuls du Syli National face à la Guinée Bissau (1-1) et contre le Soudan (1-1 et 2-2) dans le cadre des éliminatoires de la Coupe du monde (Qatar 2022) ou récemment avec les 3 défaites du Syli National U-23 dans le cadre des Jeux Olympiques Paris 2024 ( Guinée 1-2 Nouvelle Zélande; Guinée 0-1 France; Guinée 0-États-Unis 3) et bien d’autres sur la longue liste au passif du Syli National, quand on remonte dans le temps, la double fessée de Kinshasa et de Yamoussoukro en ce septembre déjà orageux suscite encore des philippiques et même des volées de bois vert contre les dirigeants, le staff technique systématiquement ciblés et livrés à la vindicte populaire. Pourtant, face à ce réel mal, ce diagnostic paraît simpliste sinon léger.
Si la pertinence de certaines analyses et critiques dans un malheureux fourre-tout interpellent et méritent l’attention du Comité Exécutif de la Fédération Guinéenne de Football, l’honnêteté intellectuelle invite à constater que les vraies causes des douleurs du public avec les échecs répétitifs du football guinéen méritent une exégèse plus approfondie sur le terrain national que de le limiter au seul quartier de Teminètaye.
En effet, si l’indignation voire la colère d’un public acquis au cuir rond est compréhensible, il n’est pas juste que les spécialistes et experts confondent l’effet et la cause de cette levée de boucliers. À défaut d’être logiques, nul ne peut ignorer que les 2 mauvais résultats et tous les autres qui indigent les Guinéens sont ceux d’une équipe d’une nation jadis de sports qui manque cruellement de Politique en la matière dans le vrai sens du terme, et ce depuis des décennies avec une crise d’infrastructures sportives à nulle pareille dans la sous-région tout au moins.
Dans un pays où l’Etat affiche son incapacité, refuse de rendre opérationnel (conformément aux exigences actuelles de la FIFA) le premier stade le mythique 28 septembre datant de 1964, plus d’un demi siècle ) et le second (Général Lansana Conté de Nongo, offert et construit par la Coopération Chinoise datant de 2008, 16 ans), où les terrains de proximité foisonnant partout à Conakry et à l’intérieur du pays n’ont plus de traces, où les compétitions scolaires et universitaires (pépinières et viviers des talents pour tous les pays), celles entre les quartiers et communes ont longtemps disparu, il est objectif que nous disposions de l’équipe que ces funestes réalités pour le football imposent avec, bien entendu, des résultats généralement médiocres que satisfaisants.
Dans un pays où, pour constituer une équipe nationale, il faut espérer, compter, courir toujours, et souvent en vain, derrière les enfants des ressortissants Guinéens installés à l’étranger principalement en Europe ; chercher à la loupe les quelques très rares petits Guinéens qui réussissent à se faire recruter par des clubs européens généralement de second degré ; faire la cour sinon acheter et naturaliser des joueurs de nationalité étrangère jugés par les dirigeants et staffs techniques de leurs pays d’origine inaptes à défendre leurs couleurs, leurs drapeaux; l’équipe depuis plus de 10 ans se regroupe et dispute ses matchs à domicile à l’étranger privant le public guinéen du spectacle dont il est friand, c’est une évidence que nos résultats sur le terrain soient moins reluisant et négatifs contre les équipes des pays où la volonté politique réitérée permet et facilite la pratique générale du sport, la construction des infrastructures modernes adaptées aux normes, favorise des centres sportifs où se forment les enfants de tous les âges et différents genres, l’organisation régulière des compétitions et à différents niveaux.
Avec une telle forme de gestion, qui refuse de disparaître depuis des décennies de notre réalité, il est difficile d’imaginer le Syli National constant dans une dynamique de performance des résultats même avec tous les meilleurs coachs du monde à son chevet ou Fédération de Football composée d’experts. Il peut arriver, et nous l’avons déjà constaté, que le Syli National réalise des exploits, mais ils ne sauraient être constants encore moins durables. Simplement, ce n’est pas la réalité du football guinéen.
Partout dans les pays où on se soucie de l’enfance, de la jeunesse, où la fabrication des élites et talents sportifs, il a été initié et conçu une politique conforme à l’ambition. À vrai dire, nous devrons plutôt louer ses joueurs qui jouent dans des conditions très difficiles d’éloignement des avantages du domicile et du soutien du public dont ils ont tant besoin.
Les lointaines performances sportives guinéennes pas seulement en football et qu’on continue, à juste titre, de célébrer étaient le fruit d’une politique conçue et mise en œuvre une décennie au moins auparavant.
Quand la Guinée, en effet, sous la première République, a eu l’ambition légitime de briler sportivement sur la scène continentale, elle s’est donnée les moyens à travers une véritable politique volontariste.
Sur le plan infrastructurel, l’Etat nouvellement indépendant Guinéen a inauguré, dès 1964, le stade omnisports du 28 septembre, l’un des rares et meilleurs temples sportifs de l’Afrique et construit des terrains dans toutes les régions (actuelles préfectures) obligées de constituer leurs équipes dites régionales composés des meilleurs des différents quartiers et sections relevant de leur autorité administrative.
L’Etat a également instituonnalisé l’organisation régulière des compétitions à tous les niveaux (établissements scolaires, universités, quartiers, régions et à l’échelle nationale). Parallèlement, des programmes de formation et de stages avec bourses extérieures ont permis de former des dirigeants, des techniciens, des arbitres et renforcer la compétitivité des athlètes.
Le premier titre du Hafia, triple champion d’Afrique des Clubs, a été enregistré en décembre 1972 et les suivants en 1975 et 1977 ainsi que les finales de 1976 et 1978 du Club de Conakry 2, la plus grande performance et l’unique finale du Syli National à une phase finale de la CAN en mars 1976 à Addis-Abeba, la participation des équipes nationales de Football et de volley aux Jeux Olympiques de Mexico en 1968, les brillants résultats africains obtenus dans les années 70-80 par les basketteurs Guinéens et basketteuses Guinéennes qui ont vaincu les redoutables Lionnes du Sénégal ( de l’époque) en finale du Tournoi de la Zone 2 en 1978, la compétitivité africaine du volley guinéen, du handball guinéen, de l’athlétisme guinéen, du judo guinéen, de la natation guinéenne dans les années ainsi que de la boxe guinéenne avec Bella Sadio et d’autres résultent justement de cette vision, de cette véritable politique initiée et mise en œuvre dès le début des années 1960 et qui a permis l’éclosion des jeunes Guinéens de Boké à Yomou.
Si dans toutes ces disciplines, l’hymne guinéen a été respecté partout en Afrique, c’est que ses enfants voués au sport, dans le contexte de l’époque, ont bénéficié d’un environnement permettant de développer et de promouvoir leur talent.
Mais, autres temps, autres mœurs
Aujourd’hui, comme toutes les Nations qui ont l’ambition de la grandeur en matière de sports, la Guinée devrait d’abord réfléchir à une forme de politique permettant le développement de son potentiel local à travers ses enfants qui se gaspillent pour se perdre dans la nature que d’attendre aléatoirement l’éclosion de binationaux. Ce qui implique de la part de l’état, à travers son ministère des sports une volonté permettant de remettre à l’endroit ce qui a été longtemps mis à l’étroit.
En d’autres termes et pour être plus précis, l’Etat guinéen doit doter le pays d’infrastructures sportives dès à présent. À commencer par la restauration du stade du 28 septembre et l’opérationnalisation du stade de Nongo, ainsi que la réalisation, dans un premier temps, pour les 8 régions administratives ou les capitales des 4 régions naturelles des stades de dimension supportable. Initier un programme de formation en faveur des cadres et techniciens de sports.
Il n’est pas inutile de souligner que nos trois principaux rivaux historiques voisins ayant longtemps subi le diktat du Football Guinéen que sont le Mali, le Sénégal et la Côte d’Ivoire ont déjà à leur actif l’organisation des phases finales de la Coupe d’Afrique des Nations et disposent chacun d’au moins 3 stades aux normes FIFA face au pays en la matière qu’était la Guinée.
C’est une régression que seule le manque de volonté politique justifie. Sans citer les stades modernes Ivoiriens réalisés sous nos yeux à la faveur de la dernière CAN, ceux du Mali qui vient de bénéficier d’un stade de la FIFA, il faut dire que le stade stade Abdoulaye Wade, inauguré le 22 février 2022, a été construit en 18 mois, les travaux ont été lancés en 2020, en pleine période Covid.
C’est un véritable scandale, un crime comparativement au stade de Nongo dont la finition inachevée a coûté à l’Etat guinéen plus de 20 milliards GNF détournés par de véreux dirigeants (j’y reviendrai). C’est dire que la Guinée peut si elle veut. Ce n’est pas les moyens qui lui manquent de construire encore moins de rendre opérationnel un stade généreusement offert par un pays ami.
Le Comité Exécutif de la Fédération Guinéenne de Football devrait faire de ces urgences la priorité de sa feuille de route. En plus des appuis matériels qu’apporte déjà la FIFA aux Associations membres à travers ses différents programmes de d’assistance, cette démarche devrait être envisagée avec tous les efforts qu’elle nécessite, car étant, dans le contexte actuel Guinéen, la seule perspective – lointaine sans doute – de lancer des compétitions et tournois susceptibles de construire et de promouvoir les talents dont on a forcément besoin pour construire le Syli National (en catégories et genres différents) capable de produire les résultats dignes d’une grande nation de Football comme la Guinée l’a été dans les années 1960-1970. Ça prendra le temps qu’il faudra, mais, il faut s’y mettre.
Dans le contexte qui est la réalité guinéenne, il serait maladroit et infructueux de s’adosser et de se faire juger par les prestations et résultats aléatoires d’une équipe laborieusement maçonnée. Il faut absolument sortir de l’illusion et des certitudes de compter récolter ce dont on n’a pas semé. Le Syli National est une permanente construction dont le socle demeure les infrastructures et les compétitions.
Les enfants qui apprennent dans la rue ne peuvent égaler ceux qui se forment dans les centres spécialisés et sur les terrains réglementaires. Les Nations qui brillent sont celles qui forment et exportent leurs sportifs sur le marché mondial pas les pays qui jouent au traficotage ou se soumettent au marchandage.
Aussi longtemps que nous ne serons pas capables de doter le Syli Football ou les Sylis (avec les autres disciplines) d’un soubassement local, comme tous les autres pays performants, aussi longtemps nos résultats resteront hasardeux, totalement en deçà des espérances et du grand amour du public pour son sport roi.
La seule responsabilité de la Fédération Guinéenne de Football comme celle des autres disciplines, hier, aujourd’hui et demain, réside dans sa capacité à comprendre et à intégrer ce principe devant guider son programme et ses relations avec les pouvoirs publics.

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