Le grand écrivain Tierno Monenembo est il ethnocentriste ?

Par Mamadou Saïdou Koulaya Diallo
Ceux qui traitent Thierno Monénembo d’écrivain ou d’intellectuel ethnocentrique en raison de sa position contre Sékou Touré oublient qu’il n’a pas été le seul à critiquer ce régime.
Le célèbre Camara Laye l’a fait dans son roman Dramous, ce qui lui a coûté l’exil, alors qu’il appartenait à la même communauté que son bourreau.
Était-il, lui aussi, ethnocentriste ?
Aliou N’fan Touré a également dénoncé le régime dans son célèbre roman Cercle des Tropiques, œuvre étudiée par ceux qui s’intéressent à la littérature africaine des années 60. Il y dresse un portrait très critique du pouvoir de Sékou Touré, allant jusqu'à le comparer à divers animaux. Pourtant, il était originaire de la Basse-Côte. Doit-on en conclure qu’il était communautariste ? Ce dernier, comme tant d’autres, a connu l’enfer de la dictature.
Williams Sassine, lui non plus, n’a jamais mâché ses mots à l’égard de Sékou Touré et de sa gouvernance dans plusieurs de ses œuvres, notamment Saint Monsieur Baly et Le Jeune Homme de sable.
Peut-on pour autant le qualifier de communautariste ?
Quant à Keïta Fodéba, qui a consacré sa vie à la révolution guinéenne, il a fini par en être victime, exécuté par le régime qu’il avait servi. Il convient aussi de rappeler que Thierno Monénembo ne s’est pas limité à critiquer la dictature guinéenne : il a dénoncé les abus autoritaires à travers toute l’Afrique. D’ailleurs, tous les prix littéraires qu’il a reçus sont internationaux, preuve de la portée universelle de son engagement.
Comme le dit un proverbe : « Celui qui attend la voix du lion, celui qui l’a vu et celui qui a échappé à ses griffes ne courent pas de la même façon. »
Certes, Sékou Touré a voulu bien faire au début, mais il a fini par abuser de son pouvoir. Et il n’a pas été le seul : de nombreux pays africains ont connu des dérives similaires, et les écrivains n’ont pas manqué de les dénoncer. Les Soleils des indépendances d’Amadou Kourouma en est un parfait exemple, étudié par ceux qui ont passé la classe de terminale.
Pour conclure, Thierno Monénembo, en tant qu’écrivain – c’est-à-dire la voix des sans-voix – est dans son droit de critiquer et de rappeler l’Histoire. Et il ne le fait pas pour plaire, mais par devoir de mémoire.
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